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Ghislain Bujold est un adepte du Cowboy action shooting, un sport qui rallie l'univers du Far West et la compétition de tirs de précision. Il nous parle de sa passion.
Au nord, le Canada, au sud, les États-Unis : deux pays si proches et si loin à la fois, surtout quand il est question d’armes à feu et de leur impact. Chez nos voisins, les meurtres et tueries de masse à l’aide de fusils sont devenus une routine malheureusement trop familière et récurrente. Selon le site de production participative Shooting Tracker – qui dénombre les fusillades sur le territoire américain –, la tragédie survenue à San Bernardino le 2 décembre dernier, est la 355e fusillade1 de masse depuis le début de l’année 2015. Cela représente plus d’un massacre par jour. Le Canada est lui aussi le théâtre de crimes commis avec des armes à feu, mais avec des chiffres beaucoup moins effarants.
Pourquoi autant de tueries là-bas? Pour plusieurs, la réponse est liée à la présence d’un trop grand nombre d’armes à feu dans la nation, au culte du fusil. Existe-t-il une culture des armes au Québec en comparaison avec nos voisins du sud? Après tout, elles ont servi à combattre, mais aussi à survivre, tant dans l’histoire du Québec et du Canada que dans celle des États-Unis. Les deux pays ont toutefois pris une direction différente quant au contrôle et à la législation des armes.
Bien qu’elle ne soit pas ancrée de la même manière dans la société québécoise, on ne peut affirmer qu’il n’existe pas de culture des armes de ce côté-ci de la frontière. Ce qui nous différencie toutefois, c’est la raison d’être des armes à feu dans un logis. Aux États-Unis, posséder une arme à feu fait partie des mœurs. Le fameux second amendement fait en sorte que détenir une ou plusieurs armes, là-bas, est un droit, alors qu’au Canada, la loi indique qu’il s’agit d’un privilège, au grand dam de plusieurs amateurs de fusils.
Ici, les armes sont surtout vues comme des outils utiles pour pratiquer la chasse ou le tir à la cible, donc pour s’adonner à un passe-temps (ou une passion, c’est selon). Il n’est pas dans la nature de la plupart des Québécois de garder une arme à la maison dans le but avoué de se défendre. Ceux qui ont des fusils voient leur possession être très réglementée et doivent conserver leurs armes sous clé, à l’abri des mains mal intentionnées ou mal avisées. Toutefois, l’existence d’organisations comme l’Association canadienne pour les armes à feu – et le nombre de ses membres –, dont les mots d’ordre sont « Liberté. Sécurité. Responsabilité. » démontre que de plus en plus de Canadiens semblent considérer les armes comme un moyen de se protéger.
En matière d'armes à feu, le Canada devrait se rapprocher d'une certaine mentalité américaine selon laquelle le port d'armes est autorisé pour tous les citoyens sans condition particulière. En accord ou en désaccord?
En matière d'armes à feu, le Canada devrait se rapprocher d'une certaine mentalité américaine selon laquelle le port d'armes est autorisé pour tous les citoyens sans condition particulière. En accord ou en désaccord?
Aux États-Unis, le second amendement de la constitution indique : « Une milice bien organisée, étant nécessaire à la sécurité d'un État libre, le droit qu'a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé. » Résultat : on retrouve dans ce pays plus d’armes que d’habitants...
Le spécialiste des armes à feu Khan Rooney décrit l'origine et la fonction d'une arme afghane.
Utiliser une arme à feu pour pratiquer la chasse est tout à fait acceptable. En accord ou en désaccord?
Utiliser une arme à feu pour pratiquer la chasse est tout à fait acceptable. En accord ou en désaccord?
Parmi les répondants à ce sondage, 86% des hommes et 76% des femmes étaient d’accord avec le fait qu’utiliser une arme à feu pour pratiquer la chasse est tout à fait acceptable.
Comment vous sentiriez-vous si vous saviez que votre voisin possède une arme à feu?
Il n'y a aucun danger à posséder une arme à feu chez soi, tant que celle-ci est déchargée et rangée en lieu sûr. En accord ou en désaccord?
Il n'y a aucun danger à posséder une arme à feu chez soi, tant que celle-ci est déchargée et rangée en lieu sûr. En accord ou en désaccord?
Au Canada, les mesures encadrant la possession et l’entreposage des armes à feu sont nombreuses : cours théorique, enquête sur les antécédents, passage annuel obligatoire au club de tir... De plus, en tout temps, les armes doivent être déchargées, munies d’un dispositif de verrouillage et entreposées dans une armoire ou un contenant lui aussi fermé à clé.
Il existe de nombreux types d’armes à feu au pays comme les armes d’épaule (comme les fusils de chasse) et les armes de poing (revolver, pistolet; n’importe quelle arme qui tient dans la main, d’où l’appellation). Elles nécessitent toutes un permis d’armes à feu, peu importe la catégorie d’armes, mais certaines peuvent être acquises sans restriction (armes d'épaule) tandis que les armes de poings tombent dans la classe des armes à autorisation restreinte.
Afin de pouvoir posséder et manier une arme de poing, des formations sur la sécurité des armes à feu à autorisation restreinte sont obligatoires. Il faut également pouvoir expliquer pourquoi on souhaite acquérir de tels engins. Au Québec, les principales raisons pour lesquelles les gens veulent se procurer ce type d’armes à feu concernent le tir à la cible ou les collections d’armes.
Si les armes de poing sont davantage contrôlées que les armes d’épaule, c’est notamment en raison de leur grosseur, comme il est plus facile de les dissimuler et de les transporter qu’une carabine.
Un individu qui souhaite transporter une arme à feu à autorisation restreinte doit être autorisé à le faire. Par exemple, si une personne acquiert une arme à feu pour faire du tir à la cible, cette condition sera ajoutée à son permis d’arme à feu et elle pourra transporter son arme pour se déplacer dans tous les clubs de tir agréés du Québec. Si la même personne désire transporter son arme à l’occasion d’un déménagement, elle devra faire une nouvelle demande pour transférer son arme d’un point A à un point B. C’est ce qu’on appelle une autorisation de transport.
Combien d'armes à feu possédez-vous dans votre ménage?
Combien d'armes à feu possédez-vous dans votre ménage?
Au Canada, les provinces où l’on retrouve le plus d’armes à feu par habitant sont, respectivement, le Yukon, Terre-Neuve-et-Labrador, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce sont également les provinces où le taux d’homicide est le plus bas.
Pierre Gravel, conservateur et fondateur du Musée canadien de l'Arme et du Bronze, présente diverses armes à Khan Rooney.
Faire partie d'un club de tir ou se passionner pour les armes à feu est un passe-temps tout à fait normal. En accord ou en désaccord?
Faire partie d'un club de tir ou se passionner pour les armes à feu est un passe-temps tout à fait normal. En accord ou en désaccord?
Chez les répondants à ce sondage, on note que seulement 60% des gens ayant déclaré ne pas posséder d’armes considèrent qu’avoir une passion pour les armes est un passe-temps normal. Il est intéressant de noter que les hommes sont beaucoup plus nombreux à partager cette opinion que les femmes.
Les récents attentats terroristes et la situation politique mondiale actuelle pourraient m'inciter à me procurer une arme. En accord ou en désaccord?
Les récents attentats terroristes et la situation politique mondiale actuelle pourraient m'inciter à me procurer une arme. En accord ou en désaccord?
L’armement des Canadiens va en augmentant. En effet, alors qu’on estimait à 7.9 millions le nombre d’armes (autant licites qu’illicites) possédées au pays en 2013, on en compterait aujourd’hui plus de 9 millions!
Pierre Turcotte, armurier et formateur, discute avec le spécialiste Khan Rooney du type d'armes qu'il apprécie.
Il fallait avoir des motifs raisonnables de craindre pour sa vie et ses biens afin de pouvoir avoir une arme de poing sur soi. Très tôt, il y a eu obligation de détenir un permis pour porter un pistolet et la vente, l’achat, la cession et la possession pour une personne de moins de 16 ans constituaient désormais une infraction.
Le Code criminel est modifié et les personnes qui veulent acquérir une arme à feu sont maintenant obligées d’obtenir un permis.
À la suite de la crise économique, il y a resserrement des lois, alors que les autorités ont l’impression que les crimes se sont intensifiés. On ne délivre désormais de permis que pour protéger la vie ou la propriété ou pour ceux qui veulent pratiquer le tir à la cible dans des clubs de tir officiels. Il est à présent légal de posséder une arme à 12 ans (plutôt que 16 auparavant).
Il est établi qu’il est maintenant obligatoire d’enregistrer les armes de poing. Des registres contenant l’identité et les coordonnées des propriétaires d’armes à feu ainsi que le type d’arme en question sont exigés.
On établit pour la première fois les différentes catégories d’armes, soit « arme à feu », « arme à autorisation restreinte » et « arme prohibée ». Il faut à présent être âgé de 16 ans minimum pour pouvoir obtenir un permis de possession d’armes à feu.
Le projet de loi C-68 – la Loi sur les armes à feu – est déposé et adopté. Un nouveau système de délivrance de permis est mis en place. On impose l’obligation d’obtenir un permis pour détenir et acheter une arme à feu et pour se procurer des munitions, ainsi que l’enregistrement de toutes les armes à feu (carabines et fusils de chasse inclus). La loi entrera en vigueur le 1er décembre 1998. C’est aussi en 1995 qu’est créé le registre des armes à feu, mis en place après les pressions répétées de la Coalition pour le registre des armes à feu, qui a, elle, vu le jour après la tuerie de l’école Polytechnique en 1989.
Dès le 1er janvier 2001, tout citoyen détenant ou souhaitant se procurer une arme à feu doit avoir un permis.
L’année 2012 marque l’abolition et la destruction du registre canadien des armes à feu partout au Canada (il faudra attendre 2015 pour le Québec). Les conséquences de cette abolition menée par les Conservateurs? Il n’est plus nécessaire pour les particuliers d’enregistrer les armes d’épaule qu’ils possèdent.
Les gens qui affectionnent les armes à feu ont généralement une mentalité plus conservatrice. Oui ou non?
Les gens qui affectionnent les armes à feu ont généralement une mentalité plus conservatrice. Oui ou non?
La culture populaire associe souvent les amateurs d’armes à feu au mode de vie campagnard, souvent associé à une mentalité plus conservatrice. Cette tendance est particulièrement lourde aux États-Unis, où les états les plus armés sont aussi ceux les plus largement adeptes du Parti républicain.
En 2002, le documentaire Bowling for Columbine, du réalisateur Michael Moore, a sans doute contribué à faire connaître à de nombreuses personnes à l’extérieur des États-Unis l’existence de la NRA, la National Rifle Association, un organisme pro-armes dont le lobby est très puissant du côté de l’Oncle Sam.
Un groupe semblable existe au Canada. Il s’agit de l’Association canadienne pour les armes à feu (ACAF), qui a été fondée en Alberta. Elle regrouperait 75 000 membres au Canada, dont près de 2500 au Québec. Certains avancent même qu’au moins 8000 Québécois adhèrent aujourd’hui à l’association. En mai 2015, l’ACAF a tenu pour la première fois de son histoire un congrès en territoire québécois. L’organisation milite notamment pour un assouplissement des règlements en matière de contrôle d’armes. Son objectif? Faire en sorte que les gens comprennent que les amateurs d’armes à feu ne sont pas des criminels ou encore à la base d’un danger imminent.
Nul besoin de préciser que les membres de l’ACAF ne furent pas mécontents de voir le registre des armes à feu aboli par le gouvernement conservateur en 2012.
En décembre 2014, une publicité de l’ACAF a mis le feu aux poudres sur les médias sociaux. Elle représentait le père Noël en train d’offrir une arme semi-automatique à un enfant en le priant de ne pas se tirer dans un œil. La publicité a soulevé l’ire des partis de l’opposition de l’époque, mais aussi de certains membres de l’association, qui considéraient que cette annonce n’allait pas aider le public à voir les amateurs d’armes affiliés à l’ACAF sous un jour positif, bien au contraire.
L'abolition du registre canadien des armes à feu est une bonne chose. En accord ou en désaccord?
L'abolition du registre canadien des armes à feu est une bonne chose. En accord ou en désaccord?
En 2012, le gouvernement conservateur de Stephen Harper fait adopter le projet de loi C-19 et souhaite détruire une importante part du registre canadien des armes à feu, pourtant établi aux frais des contribuables. Le Québec était largement opposé à cette mesure.
Que pensez-vous du fait que le gouvernement canadien ait aboli le registre des armes à feu?
L'enregistrement des armes à feu pourrait aider à prévenir ou à résoudre des cas d'homicides. En accord ou en désaccord?
L'enregistrement des armes à feu pourrait aider à prévenir ou à résoudre des cas d'homicides. En accord ou en désaccord?
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, au Canada, la plupart des crimes violents ne sont pas commis à l’aide d’une arme à feu. En outre, parmi tous les décès causés par des armes à feu, seulement environ 20% découlent d’un acte criminel. Le reste est plutôt attribuable aux accidents, aux suicides ou aux interventions policières.
Selon le psychologue Hubert Van Gijseghem, de tous les temps l’être humain – l’homme en particulier –, a ce besoin de dominer l’autre et l’apport de l’arme à feu dans l’histoire n’a fait qu’accentuer cette visée. De plus en plus d’études démontrent que ce trait s’est inscrit dans notre code génétique au fil de l’évolution. À la suite de cette évolution, l’être humain a également conservé cette envie de sensations fortes qui a contribué à sa survie, mais ce trait génétique ne se manifeste pas au même degré chez tout le monde. Il semblerait que la recherche de sensations fortes est beaucoup plus prononcée chez l’homme que chez la femme. D’ailleurs, un plus grand nombre d’utilisateurs (97 % selon M. Van Gijseghem) sont des hommes.
Appuyer sur la gâchette entraîne un fort sentiment de puissance, de pouvoir, donc de plaisir; l’ivresse de dominer l’autre, de détruire, de tuer un animal ou simplement d’atteindre une cible lointaine. Le psychologue n’hésite pas à faire un parallèle direct avec l’aspect phallique d’une arme à feu et le fait qu’elle représente une extension de soi. Le fusil éjecte quelque chose comme le sexe masculin; il tire un coup, il frappe dans le mille, atteint la cible de l’ovule.
En ce qui concerne les passionnés d’armes à feu, il prend soin néanmoins de faire une distinction entre ceux qui chassent et ceux qui pratiquent le tir sportif. En effet, le point central de la chasse est l’activité en soi et aussi, la plupart du temps, l’amour de la nature. Tandis que pour ceux qui pratiquent le tir à la cible ou les collectionneurs, c’est plutôt l’arme en tant que telle qui constitue le point central de la passion.
En 2014, il a publié l’ouvrage La psychologie du collectionneur, basé sur la rencontre de collectionneurs invétérés. Il a prouvé statistiquement et systématiquement que le taux de narcissiques était nettement plus élevé chez les collectionneurs d’armes que pour tout autre type de collection. Les chercheurs sont surtout arrivés à l’incroyable conclusion que le patrimoine génétique forgé sur plus d’un million d’années d’évolution est la principale raison d’un tel engouement pour les armes. En effet, un narcissique a d’abord une forte prédisposition génétique à vouloir se faire admirer, avoir le pouvoir, sentir la puissance et donc, cette prédisposition est activée par l’environnement au fil des ans.
Êtes-vous attiré par les armes à feu?